1.10.06

génèse d'un crime (2)

dessin d.m.




Comme les deux pôles
du monde
les rois déplumés et nus
rassemblent
leurs peuples
à leurs côtés.


Du regard
les deux élus divins
s’affrontent.


Leurs sujets murmurent
puis grondent.
On ne se cherche plus
pour de tendres assauts
de voluptueuses
insertions charnelles,
on se vise à la gorge
et si des fleuves
doivent naître encore
de ces frictions humaines,
ils seront de sang
épais
roulant
abandonné
gluant
répandu
perdu
irremplaçable.

-« Je te ferai céder »
-« D’autres ont essayé
qui en sont morts ».

Dressés
intordables
regards enchevêtrés
tissés de barbelé dru
les deux chefs de meutes
rhabillés
remplumés
prononcent ces mots
définitifs
sans desserrer les dents,
plus par le feu
de leurs yeux
que par la glace
de leur langue.


Ça sent l’affrontement
brutal
impitoyable
ravageur .
D’un instant à l’autre
tout peut s’enflammer
se consumer
jusqu’au dernier des êtres.







dessin d.m.




Il est toujours des gens
sages, peut-être
opportuns,
pour retarder,
pourtant inexorable,
l’écoulement des sabliers.


Des courtisans
des proches
des conseillers
des prêtres
des épouses
des bouffons aussi
interposent leurs prières
leurs suppliques
entre les lames acérées
des regards fous
des majestés.


S’il faut absolument déterminer
au gramme près
la puissance des rois,
s’il faut que l’un
s’incline loyalement
devant la force
de l’autre,
si Dieu
doit faire son choix
entre ses deux fils,
qu’ils se mesurent alors
les yeux dans les yeux
force d’homme
contre force d’homme
sans que soit versée une goutte
de tout ce sang
qui rayonnait
il n’y a pas une heure
dans les râles des hommes
dans les rires des femmes
dans les soupirs d’extase
et les bordées d’amour.


Plénipotentiaires
diplomates
entremetteurs professionnels
s’activent
glissants
sirupeux
auprès des potentats de marbre,
regards haineux
toujours soudés.
Subrepticement
malicieusement
l’idée bourgeonne
l’idée séduit
l’idée s’impose,
récupérée des conflits
ancestraux
et des jeux des enfants :






dessin d.m.




-« Posez-vous
face à face,
chers demis-dieux,
ancrez vos coudes
au bois dur de la table,
soudez vos poings
paume à paume
rage à rage,
gonflez vos poumons
de l’argent vif de l’air
et que la force de l’un,
transcendée
des désirs divins
et de l’amour du peuple,
torde et l’écrase
à la braise d’une coupelle d’or
le bras vaincu de l’autre.
Ainsi vous saurez,
ainsi l’on saura
ce que Dieu
veut ».




« Des hommes sont venus »
Texte déposé à SACD/SCALA




av 13 suit

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Le bras de fer... Combien de ces défis n' ai-je relevé enfant avec mon frère ou des amis...
Je me suis arrêtée au beau milieu de ton conte et je ne sais pourquoi, sans doute un sursaut de sagesse boufonne, j' avais imaginé que ce serait " Tu me tiens, je te tiens par la barbichette... " ;-)
Je suis curieuse d' entendre la suite, Hombre...
Et si on proposait cette solution pour résoudre les conflits actuels ? ou alors qu 'il n' y ait ni gagnant ni perdant...

Anonyme a dit…

En parlant d'enfance et de "barbichette", tu me fais souvenir d'une BD de Gotlib dans Rubrique à Brac ou une partie de "tu me tiens..." s'achève à coups de haches et autres objets à découper autre chose que... des barbichettes !
Bonne soirée à toi, Kaïkan.